Au passage, extrait d'un voyage
Kader Hairi qui doit nous expliquer ses installations expérimentales de spiruline (photo 4), algue aussi vieille que la vie sur Terre, et qui serait l’avenir de l’humanité pour mettre un terme à la famine dans le monde.
Installations de spiruline Photo : Alexandra Monot
Kader Hairi, homme fort affable, nous explique le potentiel miraculeux de cette plante.
Il s’agit d’une cyanobactérie rejetant de l’oxygène, poussant à l’état naturel dans des lacs de la zone intertropicale, notamment dans le Rift, dans une eau avec un pH entre 9,6 et 11, donc dans un milieu basique où elle est la seule à vivre, et à des températures de 25 à 40°C. Il est facile de faire pousser cette bactérie dans un milieu de culture à base de natron, de CO2, de sulfate de potassium, d’azote et d’urée (à raison de 0,1 g/l). Cette bactérie est fort ancienne et a peu évolué depuis des millions d’années.
Elle serait apparue avant l’atmosphère et serait à l’origine du développement de l’oxygène sur Terre. Elle fait l’objet depuis une quarantaine d’années de nombreuses études, dont celles de la NASA pour créer des compléments nutritionnels.
En effet, la spiruline a un potentiel étonnant sur le plan nutritionnel : 1kg sec de la bactérie équivaut à une tonne de fruits et légumes et de viandes en terme de vitamines, protéines et acides aminés. Un gramme de spiruline suffit donc pour nourrir une personne, ce qui représente un gain de poids considérable pour le transport dans l’espace, de plus elle est assimilable telle quelle par l’organisme. Elle permettrait ainsi de lutter contre la malnutrition. Mais elle ne comporte pas de vitamine C.
Kader Hairi a développé son petit centre expérimental, composé de quatre bassins, à la suite d’un article qu’il avait lu étant jeune dans Sciences et Vie dans les années 1960. La spiruline venait alors d’être découverte par la mission Berlier au lac Tchad. Là, la population locale mélangeait traditionnellement au mil des boulettes d’algue séchée. Un centre expérimental avait été ensuite créé par l’Institut français à Hassi Messaoud en 1960 en utilisant le CO2 issu de l’exploitation pétrolière. Avec l’indépendance de l’Algérie, le projet avait été enterré. Kader Hairi a alors repris l’idée. D’autres études menées depuis ont montré que l’existence de la spiruline est aussi attestée en Amérique latine où les Aztèques l’utilisaient déjà. Au Sahara, elle existe à l’état naturel dans certaines gueltas comme à Tin Aman. La bactérie se divise toutes les 6 heures, selon une croissance géométrique exponentielle. 7 g/m² de spiruline correspondent aux apports nutritionnels d’une personne pour 3,5 jours !
La spiruline est aujourd’hui commercialisée à prix exorbitant en parapharmacie dans les pays développés. Mais l’objectif de Kader Hairi est humanitaire, aussi a-t-il fondé une association : Sahara Spirulina. Son projet, en accord avec le gouvernement algérien, verra le jour sous peu. Il a reçu de l’administration l’autorisation d’exploiter la spiruline sur un terrain situé entre la ville de Tamanrasset et l’aéroport sur 2 ha, soit une production quotidienne de 50kg.
Cette production s’effectuera en plus à minima d’eau. En effet, la spiruline demande 1 200 à 1 500 l d’eau pour produire un kilogramme sec, contre 1 500 l pour un kg de blé et 45 000 pour un kg de riz. Son projet dans une première phase vise à produire pour vendre aux pays développés afin d’acquérir les fonds financiers nécessaires pour financer la seconde phase du programme, à but humanitaire celle-ci. D’autres projets existent en Afrique noire, notamment à Agadès au Niger.